Citation
Ath Fraisoo a écrit:
L'ami Mouloud Feraoun, le fils du pauvre
"J’étais l’unique garçon de la maisonnée. Pénétré de mon importance des l’âge de cinq ans, j’abusais bientôt de mes droits. Je devins immédiatement un tyran pour la plus petite de mes sœurs, mon aînée de deux ans.
Je l’appelais Titi – le nom lui est resté – elle n’était pas plus grande que moi et me ressemblait autant qu’une petite sœur ressemble à son frère, c’est-à-dire qu’on pouvait la reconnaître grâce à son foulard et à sa natte de cheveux longs. Elle avait un bon naturel qui lui permettait d’essuyer mes coups d’accepter mes moqueries avec une mansuétude peu imaginable chez un enfant de son âge.
Toutefois, on ne manqua pas de lui inculquer la croyance que sa docilité était un devoir et mon attitude un droit. Chaque fois qu’il lui arrivait de se plaindre, elle recevait une réponse invariable : « n’est-ce pas ton frère ? Quelle chance pour toi d’avoir un frère ! Que Dieu te le garde ! Ne pleure plus, va l’embrasser. »
Grâce à ce procédé, elle avait fini par croire inséparable la formule « que Dieu te le garde » du nom de frère et il était touchant de l’entendre dire à ma mère en pleurant : -« c’est mon frère, que Dieu me le garde, qui a mangé ma part de viande » -« mon frère, que Dieu me le garde, a déchiré mon foulard ».
Petite sœur, qui es maintenant mère de famille, ton vœu a été exaucé, Dieu t’a gardé ton mauvais frère."
Citation
Ath Fraisoo a écrit:
L'ami Mouloud Feraoun, le fils du pauvre
"J’étais l’unique garçon de la maisonnée. Pénétré de mon importance des l’âge de cinq ans, j’abusais bientôt de mes droits. Je devins immédiatement un tyran pour la plus petite de mes sœurs, mon aînée de deux ans.
Je l’appelais Titi – le nom lui est resté – elle n’était pas plus grande que moi et me ressemblait autant qu’une petite sœur ressemble à son frère, c’est-à-dire qu’on pouvait la reconnaître grâce à son foulard et à sa natte de cheveux longs. Elle avait un bon naturel qui lui permettait d’essuyer mes coups d’accepter mes moqueries avec une mansuétude peu imaginable chez un enfant de son âge.
Toutefois, on ne manqua pas de lui inculquer la croyance que sa docilité était un devoir et mon attitude un droit. Chaque fois qu’il lui arrivait de se plaindre, elle recevait une réponse invariable : « n’est-ce pas ton frère ? Quelle chance pour toi d’avoir un frère ! Que Dieu te le garde ! Ne pleure plus, va l’embrasser. »
Grâce à ce procédé, elle avait fini par croire inséparable la formule « que Dieu te le garde » du nom de frère et il était touchant de l’entendre dire à ma mère en pleurant : -« c’est mon frère, que Dieu me le garde, qui a mangé ma part de viande » -« mon frère, que Dieu me le garde, a déchiré mon foulard ».
Petite sœur, qui es maintenant mère de famille, ton vœu a été exaucé, Dieu t’a gardé ton mauvais frère."