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L'islam et le dieu purifié, Par Abdelwahab MEDDEB
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16 octobre 2006 21:07
Rebonds

Pour neutraliser la violence évoquée dans le Coran et contrer l'intégrisme, il convient de retourner à la tradition islamique à la fois grecque et christique.
L'islam et le dieu purifié

Par Abdelwahab MEDDEB

QUOTIDIEN : Lundi 16 octobre 2006 - 06:00
Abdelwahab Meddeb écrivain.
Dernier livre paru : Contre-prêches, Seuil, 2006.

Je voudrais revenir à la conférence que le pape prononça le 12 septembre à l'université de Ratisbonne. Et rappeler qu'elle a été traduite et publiée, sans la moindre altération, dans le journal de langue arabe le plus diffusé dans le monde, Asharq al-Awsat, depuis Londres, et daté du 21 septembre. Voilà donc un bel acquis et le signe que, malgré tout, l'esprit du débat se retrouve en islam.




Cette traduction courait sur le tiers d'une double page aux caractères serrés, les deux tiers restant ayant été réservés à la réponse écrite par l'intellectuel et universitaire libanais Ridwân as-Sayyid. Ainsi répondait-on à un discours académique par un autre discours académique. La dignité du dialogue a été restaurée. Mais les médias, qui construisent leur dramaturgie sur le conflit et le choc entre pôles opposés et inconciliables, n'ont pas rendu compte de cet événement. C'est qu'on préfère diffuser l'image d'un islam magmatique, qui ne sait pas argumenter, qui, excité par le prurit de l'offense, ne peut que réagir en vociférant, en protestant à coups de colère.
La réponse de Ridwân as-Sayyid était certes bien informée, conduite avec sérénité, une sérénité non dénuée d'une polémique de bon aloi, ne contrevenant jamais aux règles de la civilité. S'il a rappelé d'une manière assez convaincante le rayonnement de la raison, du logos grec en islam, il faut avouer qu'il a escamoté sinon occulté la question de la violence coranique en la mettant en écho avec la «guerre du Seigneur» dans la Torah et avec la cruauté extrême du christianisme historique, entre Croisades, Inquisition, esclavage et colonialisme. En outre, il n'a pas perçu la nécessité de lier la violence et le logos dans la conception même du Dieu à partir de ce qu'il en a été pensé dans la philosophie grecque.
Avant de traiter l'articulation entre logos et violence dans la trajectoire hellénique et ses effets sur les théologies monothéistes, reprenons la 7e controverse contenue dans les Entretiens avec un musulman consignés par l'empereur byzantin Manuel II Paléologue à la toute fin du XIVe siècle, ensemble édité, introduit, traduit, annoté et commenté par le chercheur libanais Théodore 'Adil Khoury (1). A lire de près le passage cité par le pape et ses prolongements aux pages 143-144, nous découvrons une analyse qui déconstruit le fameux verset 29 de la sourate IX, dit verset de l'épée, érigé en référence cardinale par l'interprétation islamiste, dont le sens est estimé définitif en raison de sa présence au sein de l'avant-dernière sourate révélée.
Ce verset appelle à combattre à mort les scripturaires, c'est-à-dire les juifs et les chrétiens, qui ne croient pas à la religion vraie, c'est-à-dire l'islam, à moins qu'ils acceptent de payer de main franche le tribut de la protection, signe de leur humiliation et de leur infériorité. L'analyse qui déroute le sens de ce verset proposé par Manuel Paléologue est magistrale. Voilà ce qu'il dit : «De trois choses, l'une devait nécessairement arriver aux hommes sur la terre : ou se ranger sous la loi, ou payer des tributs et de plus être réduits en esclavage, ou, à défaut de l'un et de l'autre, être taillés par le fer sans ménagement.» L'empereur byzantin montre à son interlocuteur musulman, le mudarris (2) persan, que «cela est fort absurde. Pourquoi ? Parce que Dieu ne saurait se plaire dans le sang... D'abord en effet, comment n'est-il pas absurde de payer de l'argent et d'acheter ainsi la faculté de mener une vie impie et contraire à la loi ? Ensuite, la foi est un fruit de l'âme, non du corps. Celui donc qui entend amener quelqu'un à la foi a besoin d'une langue habile et d'une pensée juste, non de violence».
C'est donc le recours à la rhétorique de persuasion fondée sur le logos qui est ici privilégié pour propager sa foi sans avoir à user des armes. «Car, reprend le Paléologue, s'il était bon d'attaquer avec l'épée ceux qui sont totalement incroyants et que ce fût là une loi de Dieu descendue du ciel [...], il faudrait sans doute tuer tous ceux qui n'embrasseraient pas cette loi et cette prédication. Il est en effet bien impie d'acheter la piété à prix d'argent.» Et les islamistes absorbent la patente contradiction révélée ici en réduisant le sens du verset en question à un appel à la guerre perpétuelle dont ils n'envisagent pas les apocalyptiques conséquences.
Or, si nous empruntons le véhicule logique utilisé par l'empereur byzantin dans une perspective strictement coranique, nous verrons que le verset de l'épée (IX, 29) peut être tout à fait neutralisé par trois autres : d'abord le verset II, 256, qui dit : «Pas de contrainte en religion», ensuite ceux qui prônent la discussion et l'appel à la persuasion par l'usage de la raison dans le respect de la civilité, deux versets (XVI, 125 et XXIX, 46) portant la même expression qui deviendra figée et couramment utilisée en langue arabe ( bi'llatî hiya ahsan, «de la plus belle des manières»). Pour que le musulman puisse intégrer pour son propre compte l'argumentaire de l'apologiste chrétien, il lui faudra au préalable inverser la procédure exégétique fondée sur les notions «d'abrogeant» et «d'abrogé» : ce sont les premiers versets purement religieux, notamment révélés à La Mecque, qui doivent gagner leur éternité sur ceux qui ont été inspirés à Médine dans un contexte politico-juridico-militaire appartenant à une conjoncture datable. Aussi n'est-ce pas le verset de l'épée qui abroge les trois versets libéraux comme veulent l'imposer les islamistes qui, en utilisant d'une manière exclusive et systématique le critère chronologique (3), dépouillent le Coran de plus de cent versets «doux» antérieurement révélés. Dans l'inversion que nous soutenons (et qui a déjà été proposée par le Soudanais Muhammad Mahmûd Tahâ), c'est justement ledit verset de l'épée qui est abrogé du fait qu'il appartient à une conjoncture historique et anthropologique révolue, la permanence se trouvant du côté des trois autres versets qui le contredisent. C'est donc à l'intérieur même du Coran que la solution gît pour régler la question de la violence et contrer la lecture opposée qu'en font les maximalistes littéralistes islamistes.
Après l'entretien que j'ai accordé à Libération (le 23 septembre) où je touchais à ces questions, j'ai reçu une correspondance de mon ami l'helléniste Jean Bollack, missive prolongée d'une conversation téléphonique, d'où il ressort que le maître de la lettre grecque, qui en réoriente l'herméneutique, propose une réception optimale de la conférence de Benoît XVI en la replaçant dans la tradition de la philologie allemande, car c'est elle qui a parlé par la bouche du pape à Ratisbonne, et ce n'est pas coutumier qu'un pape s'exprime à partir d'une telle rigueur qui entretient la complexité et l'exigence par le moyen d'une raison supérieure. Et c'est sur ce site hellénique que s'articule d'une manière indéfectible la question de la violence et de la raison quant à l'approche du Dieu.
En vérité, il faudra revenir à l'antériorité platonicienne, présocratique pour retrouver comme dans les Purifications d'Empédocle (4) cette idée d'un dieu purifié, et dont le signe de la purification est son détachement de la violence et son inscription dans un horizon de paix universelle, précocement annonciatrice du programme cosmopolitique auquel aboutit Kant au terme du processus des Lumières et qui a été récemment ranimé pour notre contemporain par la convergence d'Habermas et de Derrida, deux philosophes que tout a séparé avant leur nécessaire alliance pour conjurer les démons qui menacent le siècle.
Voici ce que dit Jean Bollack dans la présentation de sa traduction des fragments qui nous sont parvenus des Catharmes/Purifications : «Au centre, il y aura toujours la lutte contre la violence dans le monde... le bien est premier s'il est raison de vie... il existe une vérité qui conduit à faire la guerre à la guerre... il y a là une véritable utopie, répondant... à un désespoir, en s'accrochant à l'idée que la violence est contenue, que l'excès ne l'emporte pas... Il en résulte qu'il ne subsiste rien de la religion traditionnelle des Grecs..., il ne reste rien que la religion... Rien que l'amour.» Lequel aura triomphé de la haine entretenue par les démons depuis la rupture qu'a instaurée le crime premier. Bollack reprend plus loin : «Si le Dieu est homme, il est dieu avec l'homme, en lui et pour lui : dieu-homme sur terre, laissant à l'homme une chance d'être ou de devenir ce dieu qui depuis toujours occupe ses rêves et sa pensée.» C'est ce qu'a tenté Jésus. Lue dans cette perspective, la conférence du pape devra non seulement dénoncer l'islam mais aussi le judaïsme et le christianisme historique, lequel a trahi Jésus. L'enjeu est donc que, à travers les religions, il convient de retrouver la religion du Dieu purifié de la violence et qui «n'aura pas besoin de Voltaire, car il est plus voltairien que lui» (Bollack au téléphone).
Cette perspective se projette aussi dans la sphère mentale des soufis et des théosophes de l'islam. Ibn 'Arabî (1165-1240), qui cite Empédocle (peut-être a-t-il lu des fragments des Catharmes ), privilégie ce travail de purification dans les Afflictions du prisonnier et les Peines de l'éprouvé (5), oeuvre écrite en prison après une grave maladie. Il met en premier le «grand jihad», qui favorise le combat intérieur : s'il y a usage de l'épée, ce sera celle qu'il faut diriger contre son propre moi, lequel, tel le Phénix, ne cesse de renaître après la mort qu'on vient de lui infliger.
Par cette opération réitérée, le sujet participe à la purification du Dieu présent en soi. Ibn 'Arabî s'exprime de cette manière après avoir introduit la notion de Père (réputée absente en islam), identifiant en Muhammad le Père spirituel (al-Ab ar-ruhâni) qui déclasse le géniteur en tant que modèle à imiter dans ses exercices de purification (notamment par le jeûne et l'épreuve de la faim).
Nous retrouvons ces mêmes enjeux chez les descendants d'Ibn 'Arabî qui étayent la tradition platonicienne de Perse déjà acclimatée par Avicenne (980-1037) et Sohrawardi (1155-1191). Chez Molla Sadra de Chiraz (1571-1640), par exemple, la notion de jihad, de guerre sainte, comme révélatrice de la violence du Dieu, s'annule d'elle-même dans le processus de purification entretenu par ses spéculations métaphysiques, notamment dans son exégèse coranique (Tafsîr al-Qur'ân al-Karîm), où le long des sept volumes publiés, jamais le jihad n'apparaît ; cette dernière notion semble faire implicitement partie du bagage que portent les ignorantins (juhhâl) que ne cesse de traquer et de confondre le divin interprète.
C'est aussi à cette tradition islamique, à la fois grecque et christique, qu'il convient de retourner pour actualiser la neutralisation de la violence et contrer ceux qui, à partir de leur littéralisme coranique, menacent la paix dans le monde.
"Si les singes savaient s'ennuyer ils pourraient devenir des hommes." (Goëthe)
s
17 octobre 2006 08:19
je retient entre autres ceci:

C'est qu'on préfère diffuser l'image d'un islam magmatique, qui ne sait pas argumenter, qui, excité par le prurit de l'offense, ne peut que réagir en vociférant, en protestant à coups de colère.


c'est à nous de se mobiliser contre ce dénigrement par des actions hors du commun.

C'est une guerre de communication qu'on a perdue.
n
17 octobre 2006 18:45
ATTENTION!! ne jouons pas avec la philosophie de platon et la religion; l'islam la religion de paix que j'ai étudiée dans une famille modeste n'a rien avoir a l'islam intégriste qui prend sa naissance???? et tu le sais très bien, le coran.... il faut bien le comprendre pour l'interpréter!!!! désolée mon frère je ne veux pas te répondre ainsi, mais j'étais choqué vraiment!!!! que DIEU te benisse.
s
17 octobre 2006 19:22
Citation
nagwa a écrit:
ATTENTION!! ne jouons pas avec la philosophie de platon et la religion; l'islam la religion de paix que j'ai étudiée dans une famille modeste n'a rien avoir a l'islam intégriste qui prend sa naissance???? et tu le sais très bien, le coran.... il faut bien le comprendre pour l'interpréter!!!! désolée mon frère je ne veux pas te répondre ainsi, mais j'étais choqué vraiment!!!! que DIEU te benisse.


Je n'ai rien compris nagwa , explique moi mieux pour que je puisse saisir ton propos Ma soeur;
H
17 octobre 2006 20:43
this part of the forum is for historie & culture. PLEASE respect that. wash ma3andkomche tarikh ghi kat3amroh bi ay haja?? eye rolling smiley

message for the admin: just look at the subjects on this part of the forum, i think only 20% of the subjects have realy something to do with historie or culture. it looks now little bit chaostic.
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