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Exclusif : Un ministre d’un pays subsaharien au cœur d’une affaire de sextorsion au Maroc

Un ministre d’un pays subsaharien a été victime d’un réseau de sextorsion au Maroc, ce qui a nécessité l’intervention d’un cabinet de détectives privés puis des autorités marocaines pour éviter le pire. Au Maroc, ce genre d’affaires n’est malheureusement pas un cas isolé.

Photo d'illustration. / DR
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Les réseaux de sextorsion opérant depuis le Maroc ne visent pas que le citoyen lambda. Au début de l’année dernière, les autorités marocains ont démantelé un réseau de sextorsion composé de migrants d'origine subsaharienne basé au Maroc qui a tenté de faire chanter un ministre et homme d’affaires d'un pays africain.

Tout a démarré à partir d’une conversation Facebook entre ledit ministre et une personne qui s’est présentée comme une orpheline subsaharienne installée au Maroc. L’échange, au début duquel l’orpheline présumée fait part à sa victime de sa volonté d’immigrer en Europe, évolue vers un partage de photos et de vidéos entre le responsable politique et son interlocutrice. Le ministre, piégé par le réseau, n’hésite pas à lui envoyer de l’argent avant qu’il parvienne à la démasquer : il s’agit en réalité d’un homme qui va dès lors menacer le responsable politique de divulguer la totalité du contenu de leurs échanges sur les réseaux sociaux.

En panique vu son statut d’homme d’Etat, ce dernier saisit alors un cabinet de détectives privés. Il lui fournit une copie du passeport du malfaiteur en plus des différents noms utilisés pour l'escroquerie, comme l'a constaté Yabiladi dans l'échange d'email.

Cinq subsahariens arrêtés pour sextorsion

L’enquête menée a ainsi révélée qu’il s’agissait d’une bande composée de cinq subsahariens, dont une femme, tous résidant au Maroc, nous confie un détective privé, contacté par Yabiladi et travaillant pour le compte de la société Maroc Investigation. Celle-ci s’est chargée, au nom de son client, du dépôt d’une plainte auprès des autorités marocaines, qui ont fini par arrêter les cinq malfaiteurs. «Ils ont été condamnés à des peines allant de un à trois ans de prison pour les faits qui lui étaient reprochés», précise notre interlocuteur.

Ce genre d’affaires n’est malheureusement pas un cas isolé. «Ces cas de sextorsion sont assez fréquents : chaque jour, nous recevons presque dix appels rien que pour ce genre d’affaires», nous informe le détective privé. «Les auteurs de ces crimes peuvent être des Marocains ou des Subsahariens résidant au Maroc», rappelle-t-il.  

Et il n’a pas tort. Rien qu’en octobre dernier, les services de police et de la gendarmerie de Skhirat avaient interpellé quatre cybercriminels spécialisés dans le chantage sexuel via les réseaux sociaux. Ils piégeaient leurs victimes lors de discussions érotiques directes, avant de les filmer dans des positions compromettantes pour les faire chanter, ce qui a poussé plusieurs victimes à porter plainte auprès des services de police de Témara et de Rabat.

L’ONG Transparency Maroc avait même lancé, en mai 2017, une campagne pour détecter, identifier et signaler les cas de sextorsion au Maroc.

Un cercle vicieux qui débute par de fausses promesses

Seulement, pour le cas du ministre, aucun Marocain n’était impliqué. «L’une des personnes était du même pays, tandis que les quatre autres mises en cause étaient de différents pays d'Afrique subsaharienne», explique notre source.

Rappelant que les interventions du cabinet reste «sûres à 100% et ne dépassent généralement pas 28 jours», notre interlocuteur assure que «tout se passe en toute légalité et avec la collaboration des autorités marocaines». Il souligne que ces malfaiteurs «se font passer pour des personnes pauvres afin de susciter la sympathie de leurs victimes», comme pour le cas du ministre. «Ils sont très intelligents et manipulateurs. Souvent, ils ont des documents d’identité falsifiés», ajoute-t-il.

Grâce à ces documents, «même si les agences de transfert d’argent multiplient les mesures pour démasquer ces personnes, ces malfaiteurs réussissent à s’en tirer et à retirer les sommes envoyées par leurs victimes», explique-t-il. Et de mettre en garde contre les fausses promesses de ces auteurs de chantage. «Ils promettent au début de détruire tout matériel compromettant ou preuve contre une petite somme d’argent, pour tendre un piège à la victime. Mais je conseille aux gens de ne pas céder, car les malfaiteurs réapparaissent et demandent encore plus d’argent», alerte-t-il.

Le détective privé souligne aussi que «dans certains cas, même lorsque ces malfaiteurs ont terminé leur chantage, ils cèdent les données de leurs victimes à leurs amis pour prendre le relai». Mais les malfaiteurs adaptent continuellement leurs techniques aux mesures prises par les autorités nationales.